Elle est arrivée doucement,
Sans prévenir, sournoisement,
Elle a détruit complètement
Ma Maman.
Rien ne pouvait nous faire penser
Que toutes ses pertes de mémoire,
Toutes les bêtises qu'elles faisait
La rapprochaient d'un grand trou noir.
Elle oubliait beaucoup de choses,
Et devenait très étourdie,
Très souvent elle était morose,
Sa raison semblait endormie
Elle s'est intallée lentement,
Sans prévenir, sournoisement,
Elle a détruit complètement
Ma Maman.
Elle a vite oublié son âge
Et le prénom de ses enfants ;
Dans sa tête un remue ménage
Dérangeait son entendement.
Elle est retombée en enfance
Et réclamait ses chers parents,
Sa détresse devenait immense
Et ses propos incohérents.
Puis elle a joué à la poupée,
Elle la berçait tout doucement
Et lui chantait une mélopée
Avec ses gestes de Maman.
Elle a progressé patiemment,
Sans le moindre ménagement,
Elle a détruit complètement
Ma Maman.
Le jour où elle n'a plus parlé,
Son doux regard s'est endormi,
Ses mains se sont mises à trembler,
Ses gestes se sont ralentis.
Elle n'arrivait plus à marcher,
Ses jambes ne la portaient plus,
Elle ne pouvait même plus manger :
J'ai compris qu'elle était perdue.
Pourtant elle me reconnaissait
L'espace d'un très court instant,
Doucement elle me caressait,
Mais cela ne durait qu'un temps.
Elle attendait bien patiemment,
Elle sentait venir le moment
Où elle me prendrait froidement
Ma Maman.
Le dernier jour à l'hôpital,
Elle ma souri très tendrement,
Juste le temps d'avoir très mal
Et j'ai perdu ma chère Maman.
Pourtant elle respirait encore,
Son visage souvent grimaçait,
Mais autour d'elle rôdait la mort :
C'est la maladie qui gagnait.
Et elle gagnait complètement,
Elle avait choisi son moment
Pour me voler totalement
Ma Maman.
Ce poème est paru dans la revue contact de France Alzheimer n° 46, il reflète ce que l'on vit.
Il m'a été adressé par Nhu.